Compétence

Management / jugements psychologiques de la personne remplaçant “métier” et “qualification”. Permet de détruire la mobilisation collective au profit de l’individualisation des carrières. Directement importées des techniques du management libéral, les « compétences » ont avantageusement remplacé « la qualification » et « le métier » dans le langage des formateurs et des employeurs, (notamment associatifs). Le patronat veut se débarrasser des « métiers » qui permettent de résister collectivement et de s’organiser syndicalement. Comme il faudra désormais en changer cinq à six fois dans une vie, ce sont les « compétences » à s’adapter, à se rendre « employable » qui serviront désormais à évaluer les travailleurs (pardon – les collaborateurs »). Finissons en avec le « savoir faire » et célébrons l’ère nouvelle du « savoir-être ». Savoir être docile, souple, interchangeable, malléable, motivé, imaginatif, créatif, convivial, communiquant…et plaisant à son employeur (pardon – à son collaborateur). C’est la personne, son être intime, sa vie privée, sa culture, son comportement, qui doivent être enrôlés dans la productivité du service…au nom de la qualité, ou du militantisme et de la noblesse des missions (culture pour tous, sport pour tous, loisirs pour tous…) et pour garder les subventions, c’est-à-dire la part de marché public.

On peut ainsi, à l’école et dans l’entreprise découper le comportement du travailleur en sous-compétences , telles que « manifester l’envie d’apprendre », « accepter des activités contraignantes », « savoir être autonome « , « faire preuve d’initiatives », « gérer son temps » ou « respecter les règles de vie au sein de l’association » (on peut lire Jean Pierre Le Goff. La barbarie douce. Paris. La découverte. 1999) autant de critères qui relèvent de l’expérience personnelle et non d’une rationalisation des tâches. On y trouvera curieusement aucune compétence telle que « tenir tête à un maire », “contester son patron”, “questionner le bien-fondé d’une décision” ou « résister à une dérive marchande de l’association » !

Pourtant, le travail n’est pas simple affaire de compétences. Il s’y tisse aussi un univers de coopération et de conflits qui dessinent une identité collective et professionnelle. Avec l’évaluation de ses compétences, l’animateur socioculturel sent peser sur lui la pression à être conforme, pour le bien politique et financier de l’association. Comment des associations progressistes forgées dans une histoire des luttes sociales on pu en arriver à relayer en toute naïveté et bonne conscience ce discours réactionnaire n’est pas un mystère : c’est la grande victoire du capitalisme qui est d’abord – on ne le dira jamais assez – une victoire sur les mots, n’en déplaisent à ceux qui croient encore que les mots ne sont que des mots, et pas une manière d’agir !

Le portefeuille de compétences des nouveaux emplois-jeunes médiateurs de quartier, seront régulièrement évaluées par leurs tuteurs avec les partenaires de l’action.

La souplesse, la soumission et la collaboration active et ardente des jeunes payés pour calmer la rébellion de leurs copains, leur capacité à intégrer le discours des institutions fera l’objet d’un contrôle avec les financeurs